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histoire de grain-de-beauté
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le capitaine le pria de l’attendre sur le pont, et s’éloigna pour chercher l’argent. Mais il ne reparut plus, et soudain les voiles furent déployées toutes grandes et le navire fendit la mer, comme l’oiseau.

Lorsque Grain-de-Beauté se vit ainsi prisonnier sur l’eau, sa stupéfaction fut extrême. Mais à qui pouvait-il avoir recours, d’autant plus qu’il ne voyait aucun marin à qui demander des explications, et que le navire semblait voler sur la mer sous l’impulsion de l’invisible.

Pendant qu’il était ainsi perplexe et épouvanté, il vit enfin arriver le capitaine, qui se caressait la barbe et le regardait d’un air moqueur, et qui finit par lui dire : « C’est bien toi, le musulman Grain-de-Beauté, fils de Schamseddîn du Caire, qui as été à Baghdad au palais du khalifat ? » Il répondit : « C’est moi le fils de Schamseddîn ! » Le capitaine dit : « Eh bien ! dans quelques jours nous allons arriver à Genoa, dans notre pays chrétien. Et tu verras, ô musulman, le sort qui t’y attend ! » Puis il s’en alla.

Et de fait, la navigation ayant été fort heureuse, le navire arriva au port de Genoa, ville des chrétiens d’Occident. Et aussitôt une vieille femme, accompagnée de deux hommes, vint à bord chercher Grain-de-Beauté, qui ne savait plus que penser de l’événement. Pourtant, se fiant à la destinée bonne ou mauvaise qui le dirigeait, il suivit la vieille, qui le conduisit, à travers la ville, à une église appartenant à un couvent de moines.

Arrivée à la porte de l’église, la vieille se tourna vers Grain-de-Beauté et lui dit : « Désormais tu dois te considérer comme domestique de cette église et