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histoire de grain-de-beauté
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Quant à Gros-Bouffi, de ne plus pouvoir arriver à la belle esclave Yasmine il s’alita pour de bon et ne se releva plus.

Or, il faut se rappeler que Yasmine avait été, dès la première nuit de son mariage, rendue enceinte par Grain-de-Beauté. Aussi, quelques mois après son arrivée à la maison du wali, elle accoucha à terme d’un enfant mâle aussi beau que la lune, qu’elle appela Aslân, tout en pleurant à chaudes larmes, elle et toutes les esclaves, que le père ne fût pas là pour donner lui-même un nom à son fils.

Le petit Aslân fut allaité deux ans par sa mère, et devint solide et fort beau. Et comme il savait déjà marcher tout seul, sa destinée voulut qu’un jour, pendant que sa mère était occupée, il montât les marches de l’escalier de la cuisine et arrivât dans la salle où se tenait assis, égrenant son chapelet d’ambre, le wali, l’émir Khaled, père de Gros-Bouffi.

À la vue du petit Aslân, dont la ressemblance avec son père Grain-de-Beauté était absolue, l’émir Khaled sentit les larmes lui venir aux yeux, et il appela l’enfant et le prit sur ses genoux et se mit à le caresser, fort ému, et se dit : « Béni soit Celui qui crée des objets si beaux et leur donne l’âme et la vie ! »

Pendant ce temps, l’esclave Yasmine s’apercevait de l’absence de son enfant ; affolée, elle le chercha partout et se décida, en dépit de toutes les convenances, à entrer, les yeux hagards, dans la salle où se tenait l’émir Khaled. Et elle vit le petit Aslân assis sur les genoux du wali ; et il s’amusait à enfon-