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histoire de grain-de-beauté
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dans la maison de celui qu’il considérait comme son plus fidèle confident et son intime, celui qu’il avait comblé de ses faveurs et en qui il avait placé une confiance sans limites, il resta pendant une heure de temps sans prononcer une parole, puis il se tourna vers le chef de ses gardes et dit : « Qu’on le pende ! »

Aussitôt le chef des gardes sortit et fit crier la sentence par toutes les rues de Baghdad, et se rendit à la maison de Grain-de-Beauté, qu’il arrêta lui-même et dont il confisqua sur l’heure les femmes et les biens. Les biens furent versés au trésor public, et les deux femmes allaient être criées sur le marché comme esclaves : mais alors le wali, père de Gros-Bouffi, déclara qu’il emmenait l’une, qui était l’ancienne esclave achetée par Giafar ; et le chef des gardes fit conduire à sa propre maison l’autre qui était Zobéida à la belle voix.

Or, ce chef des gardes était justement le meilleur ami de Grain-de-Beauté, et il lui avait voué une affection de père qui ne s’était jamais démentie. Aussi, bien qu’il exécutât en public les terribles mesures de rigueur prises contre Grain-de-Beauté par la colère du kalifat, se jura-t-il de sauver la tête de son fils adoptif, et commença-t-il par mettre chez lui en sûreté l’une de ses épouses, la belle Zobéida, que le malheur avait anéantie.

Le soir même devait avoir lieu la pendaison de Grain-de-Beauté, qui était pour le moment enchaîné au fond de la prison. Mais le chef des gardes veillait sur lui. Il alla trouver le gardien en chef de la prison et lui dit : « Combien as-tu de prisonniers condamnés à être pendus cette semaine, sans recours ? »