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les mille nuits et une nuit

Le khalifat, une fois vêtu de cette robe rouge, entra dans le diwan et s’assit sur le trône, tout seul dans la salle. Et tous les chambellans, et tous les vizirs entrèrent un à un et se prosternèrent la face contre terre, et restèrent dans cette position, excepté Giafar qui, pâle pourtant, se tenait droit et les yeux fixés sur les pieds du khalifat.

Au bout d’une heure de ce silence effrayant, le khalifat regarda Giafar impassible et lui dit d’une voix sourde : « La coupe bouillonne ! » Giafar répondit : « Qu’Allah empêche tout mal ! »

Mais à ce moment entra le wali accompagné d’Ahmad-la-Teigne. Et le khalifat lui dit : « Approche-toi d’ici, émir Khaled ! Et dis-moi comment va la tranquillité publique à Baghdad ! » Le wali, père de Gros-Bouffi, répondit : « La tranquillité est parfaite à Baghdad, ô émir des Croyants ! » Le khalifat s’écria : « Tu mens ! » Et comme le wali, bouleversé, ne savait encore comment s’expliquer cette colère, Giafar, qui était à côté de lui, lui glissa à l’oreille, en deux mots, le motif qui acheva de le consterner. Puis le khalifat lui dit : « Si avant la nuit tu n’as pu retrouver les objets précieux, qui me sont plus chers que mon royaume, ta tête sera suspendue à la porte du palais ! »

À ces paroles, le wali embrassa la terre entre les mains du khalifat et s’écria : « Ô émir des Croyants, le voleur doit certainement être quelqu’un du palais, car le vin qui s’aigrit porte en lui-même son propre ferment. Et puis permets à ton esclave de dire que le seul homme responsable ne peut être que le commandant de la police, qui est seul chargé de cette