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histoire de grain-de-beauté
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vieille femme répondit : « Ô mon fils, qu’Allah préserve ta belle jeunesse ! Oui certes ! tu ferais bien de t’abstenir de copuler ! » Et elle le laissa ahuri et rentra chez la divorcée, à laquelle elle persuada la même chose au sujet de l’adolescent qui devait servir de Délieur. Et elle lui conseilla l’abstention afin de ne pas se faire contaminer. Après quoi elle s’en alla.

Quant à Grain-de-Beauté il continua à attendre un signe de l’adolescente, avant d’entrer chez elle. Mais il attendit longtemps sans voir rien venir si ce n’est une esclave qui lui porta un plateau de mets. Il mangea et but, puis, pour occuper le temps, il récita une sourate du Korân, et se mit ensuite à fredonner quelques strophes lyriques d’une voix plus suave que celle du jeune David en présence de Saül.

Lorsque la jeune femme, à l’intérieur, eut entendu cette voix, elle se dit : « Que prétendait-elle donc, cette vieille de malheur ? Est-ce qu’un homme atteint de lèpre peut être doué d’une si belle voix ? Par Allah ! je vais l’appeler et voir de mes propres yeux si cette vieille-là ne m’a pas menti. Mais auparavant je vais lui répondre. » Et elle prit un luth indien qu’elle accorda savamment et, d’une voix à faire s’arrêter au fond du ciel les oiseaux dans leur vol, elle chanta :

« J’aime un jeune daim aux doux yeux langoureux. Sa taille est si souple que les flexibles rameaux apprennent à onduler à le voir se balancer ! »

Lorsque Grain-de-Beauté eut entendu les pre-