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histoire de bel-heureux…
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dans les corridors, alla s’asseoir sur le trône et attendit sa destinée.

Il était là à peine depuis quelques instants, quand un bruit de soieries parvint à ses oreilles, répercuté par la voûte, et il vit entrer, par l’une des portes latérales, une jeune femme à l’aspect royal, habillée seulement de ses vêtements d’intérieur, sans voile sur le visage ou foulard sur les cheveux ; et elle était suivie d’une petite esclave mignonne, les pieds nus, qui portait sur la tête des fleurs et tenait à la main un luth en bois de sycomore. Et cette dame n’était autre que Sett Zahia elle-même, la sœur de l’émir des Croyants.

Lorsque Sett Zahia vit cette personne voilée assise dans la salle, elle s’approcha d’elle gentiment et lui demanda : « Qui es-tu, ô étrangère que je ne connais pas ? Et pourquoi restes-tu ainsi voilée dans le harem où nul œil indiscret ne peut te voir ? » Mais Bel-Heureux, qui s’était hâté de se mettre debout, n’osa articuler un mot et prit le parti de faire le muet. Et Sett Zahia lui demanda : « Ô jeune fille aux yeux si beaux, pourquoi ne me réponds-tu pas ? Si par hasard tu es une esclave renvoyée du palais par mon frère l’émir des Croyants, hâte-toi de me le dire et j’irai intercéder en ta faveur, car il ne me refuse jamais rien. « Mais Bel-Heureux n’osa guère faire de réponse. Et Sett Zahia pensa que ce mutisme de la jeune fille avait pour cause la présence de la petite esclave qui était là, les yeux écarquillés, à regarder avec étonnement cette personne voilée et si timide. Elle lui dit donc : « Va, ma mignonne, et reste derrière la porte pour empêcher n’importe qui d’entrer dans la salle. » Et lorsque la