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histoire de bel-heureux…
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Aussi, il ne faut point s’étonner que le médecin persan ait été réputé en quelques jours, parmi tous les notables et les gens riches, pour sa science extraordinaire, et que le bruit de tous ses prodiges soit arrivé aux oreilles mêmes du khalifat et de sa sœur El-Sett Zahia.

Donc, un jour que le médecin était assis au milieu de la boutique et dictait une ordonnance à Bel-Heureux qui était à ses côtés et tenait le calam à la main, une respectable dame, montée sur un âne à la selle de brocart rouge constellée de pierreries, s’arrêta à la porte, noua la bride de l’âne à l’anneau de cuivre qui surmontait le pommeau de la selle, puis fit signe au savant de venir l’aider à descendre. Aussitôt il se leva avec empressement, courut lui prendre la main et la fit descendre de l’âne et entrer dans la boutique, où il la pria de s’asseoir après que Bel-Heureux lui eût avancé un coussin en souriant discrètement.

Alors la dame sortit, l’ayant tiré de sa robe, un flacon rempli d’urine et demanda au Persan : « C’est bien toi, ô vénérable cheikh, qui es le médecin arrivé de l’Irak-Ajami pour faire ces cures admirables à Damas ? » Il répondit : « C’est ton esclave lui-même. » Elle dit : « Nul n’est l’esclave que d’Allah ! Sache donc, ô maître sublime de la science, que ce flacon-là contient la chose que tu comprends, et dont la propriétaire est la favorite, bien que vierge encore, de notre souverain l’émir des Croyants. Ici les médecins n’ont pu deviner la cause de la maladie qui l’a alitée dès le premier jour de son arrivée au palais. Aussi El-Sett Zahia, la sœur de notre maître, m’a envoyé vous porter ce