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les mille nuits et une nuit

achetée par lui, est une fille de roi enlevée dans son pays par les marchands d’esclaves. » Et son épouse lui répondit : « Qu’Allah augmente ta joie et ses bienfaits ! » Et la sœur du khalifat demanda : « Comment s’appelle-t-elle ? Est-elle brune ou blanche ? » Le khalifat répondit : « Je ne l’ai pas encore vue. »

Alors la sœur du khalifat, dont le nom était Sett Zahia, s’informa de l’appartement où était l’adolescente, et alla aussitôt la voir. Elle la trouva courbée en deux, le visage brûlé par le soleil et tout en larmes : et elle était presque sans connaissance.

À cette vue, Sett Zahia, dont le cœur était tendre, fut prise de compassion et s’approcha de l’adolescente et lui demanda : « Pourquoi pleures-tu, ma sœur ? Ne sais-tu qu’ici tu es désormais en sûreté, et que la vie te sera légère et sans soucis ? Où peux-tu mieux tomber que dans le palais de l’émir des Croyants ? » À ces paroles, la fille de Prospérité leva des yeux surpris et demanda : « Mais, ô ma maîtresse, en quelle ville suis-je donc, puisque c’est ici le palais de l’émir des Croyants ? » Sett Zahia répondit : « Dans la ville de Damas. Comment ! tu ne le savais donc pas ? Et le marchand qui t’a vendue ne t’a-t-il pas avisée que c’était pour le compte du khalifat Abd El-Malek ben-Merouân ? Mais oui, ma sœur, tu es ici désormais la propriété de l’émir des Croyants, dont je suis la sœur. Sèche donc tes larmes et dis-moi ton nom. »

À ces paroles, la jeune femme ne put plus retenir les sanglots qui l’étouffaient, et murmura : « Ô ma maîtresse, dans mon pays on m’appelait Belle-Heureuse ! »