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les mille nuits et une nuit

Avec tout cela, il avait continué à être aussi frais que la corolle des roses et aussi délicieux que la brise du soir. Et justement les poètes de son temps ont-ils essayé de rendre, en cadence, la beauté qui les frappait, et l’ont lui-même chanté en des vers nombreux, dont ceux-ci entre mille :

« Quand les humains le voient ils s’écrient : « Ah ! ah ! » Quand ils le voient, ils peuvent lire ces mots que la beauté a tracés sur son front : « J’atteste qu’il est le seul beau ! »

« Ses lèvres sont, si elles sourient, des cornalines ; sa salive est du miel fondu ; ses dents un collier de perles ; ses cheveux viennent en boucles noires s’arrondir sur ses tempes, tels des scorpions qui mordent le cœur des amoureux.

« C’est d’une rognure de ses ongles qu’a été fait le croissant de la lune ! Mais sa croupe fastueuse qui tremble, mais les fossettes de ses fesses, mais la souplesse de sa taille ! elles sont au-dessus de toutes paroles ! »

Aussi le roi Schahramân aimait-il beaucoup son fils, et tellement qu’il ne pouvait s’en séparer un instant. Et comme il craignait de le voir dissiper dans les excès ses qualités et sa beauté, il souhaitait fort le marier de son vivant et se réjouir ainsi de sa postérité. Et un jour que cette idée le préoccupait plus que de coutume, il s’en ouvrit à son grand-vizir qui lui répondit : « L’idée est excellente ! car le mariage adoucit les humeurs. » Alors le roi Schahramân dit au chef eunuque : « Va vite dire à mon fils