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histoire de bel-heureux…
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temps et lui demanda : « Puisqu’il est d’usage pour les maîtres de donner un nom aux esclaves achetés, comment penses-tu appeler la petite fille ? » Printemps répondit : « À toi la préférence. » Elle répondit : « Nommons-la Belle-Heureuse ! » Printemps répondit : « Mais certainement. Je ne trouve à la chose aucun inconvénient. »

Et l’enfant, de la sorte, fut appelée Belle-Heureuse, et fut élevée avec Bel-Heureux, exactement sur le même pied. Et tous deux grandirent ensemble en augmentant tous les jours en beauté ; et Bel-Heureux appelait la fille de l’esclave : « ma sœur », et elle l’appelait : « mon frère ».

Lorsque Bel-Heureux eut atteint l’âge de cinq ans, on songea à célébrer sa circoncision. On attendit pour cela la fête de la naissance du Prophète (sur lui la prière et le salut !) afin de donner à ce rite précieux toute la manifestation de beauté qu’il comporte. Solennellement donc on fit la circoncision à Bel-Heureux qui, au lieu de pleurer, ne fut pas loin de trouver à la chose de l’agrément et qui, comme d’ailleurs en toute circonstance, souriait gentiment. Alors le cortège se forma nombreux et imposant, composé de tous les parents, amis et connaissances de Printemps et de la fille de son oncle ; puis, bannières et clarinettes en tête, il traversa toutes les rues de Koufa, et Bel-Heureux était juché sur un palanquin rouge porté par une mule richement caparaçonnée de brocart, et à ses côtés était assise la petite Belle-Heureuse qui l’éventait avec un mouchoir de soie. Derrière le palanquin suivaient les amies, les voisines et les enfants qui charmaient