Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 5, trad Mardrus, 1900.djvu/142

Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
les mille nuits et une nuit

cheuse, en l’immobilisant figée dans un sel froid et sans vie !

« En vérité, je vous le dis, ce siècle charmant appartient aux petits ! »

Lorsque Kamaralzamân eut entendu ces vers et saisi leur signification, il fut excessivement confus et ses joues rougirent à l’égal d’un tison enflammé ; puis il dit : « Ô roi, ton esclave t’avoue son manque de goût pour ces choses dont il n’a pu prendre l’habitude. Et de plus je suis trop petit pour pouvoir supporter des poids et des mesures que ne pourrait tolérer le dos d’un vieux portefaix ! »

À ces paroles, Sett Boudour se mit à rire extrêmement, puis dit à Kamaralzamân : « Vraiment, ô délicieux garçon, je ne comprends rien à ton effarouchement ! Écoute donc ce que j’ai à te dire à ce sujet : ou bien tu es petit ou bien tu es majeur. Si tu es encore petit et que tu n’aies pas atteint l’âge de la responsabilité, on n’a rien à te reprocher ; car il n’y a point à blâmer les actes sans conséquence des petits ou à les considérer d’un œil dur et violent ; — si tu es dans un âge responsable, et je le crois plutôt, à t’entendre discuter avec tant de raison, — alors qu’as-tu à hésiter ou à t’effaroucher puisque tu es libre de ton corps et que tu peux le consacrer à l’usage que tu préfères, et que rien n’arrive que ce qui est écrit ? Songe surtout que c’est moi plutôt qui devrais m’effaroucher, puisque je suis plus petit que toi ; mais moi, je mets en application ces vers si parfaits du poète :