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les mille nuits et une nuit

« Mais ce n’est pas tout ! Le difficile n’est pas là ; le difficile est d’embarquer ces vases sur le navire sans attirer l’attention et exciter la cupidité des hommes à l’âme noire qui habitent la ville. Or, dans mon jardin, ces oliviers sont chargés de leurs fruits, et là-bas où tu vas, à l’île d’Ébène, les olives sont chose rare et fort estimée ! Je vais donc courir acheter vingt grands pots que nous remplirons à moitié de lingots et de sable d’or et le reste, jusqu’en haut, des olives de mon jardin. Et alors seulement nous pourrons les faire porter sans crainte au navire en partance. »

Ce conseil fut immédiatement suivi par Kamaralzamân qui passa la journée à préparer les pots achetés. Et, comme il ne lui restait plus que le dernier pot à remplir, il se dit : « Ce miraculeux talisman n’est pas assez en sûreté autour de mon bras ; on peut me le voler pendant mon sommeil ; il peut se perdre autrement. Il vaut donc mieux, à coup sûr, que je le mette au fond de ce vase ; puis je le couvrirai avec les lingots et la poudre d’or, et par-dessus le tout je placerai les olives ! » Et aussitôt il mit son projet à exécution ; et la chose finie, il recouvrit le dernier pot de son couvercle de bois blanc ; et, pour reconnaître au besoin ce pot au milieu des vingt, il y fit une encoche vers la base, puis, entraîné par ce travail, il grava complètement son nom au couteau, « Kamaralzamân », en beaux caractères entrelacés.

Cette besogne finie, il pria son vieil ami d’aviser les hommes du navire qu’ils eussent à venir le lendemain prendre les pots. Et le vieillard s’acquitta aussitôt de la