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histoire de karamalzamân avec boudour
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au hammam, enveloppée de foulards pour qu’elle ne prît pas froid.

Quant à Sett Boudour elle continua ainsi tous les jours à siéger sur le trône de l’île d’Ébène et à se faire aimer par ses sujets qui la croyaient toujours un homme et faisaient des vœux pour sa longue vie. Mais, le soir venu, elle allait retrouver avec bonheur sa jeune amie Haïat-Alnefous, la prenait dans ses bras et s’étendait avec elle sur le matelas. Et toutes deux, enlacées jusqu’au matin comme un époux avec son épouse, se consolaient par toutes sortes d’ébats et de jeux délicats, en attendant le retour de leur bien-aimé Kamaralzamân. Et voilà pour tous ceux-là !

Mais pour ce qui est de Kamaralzamân, voici ! Il était resté dans la maison du bon jardinier musulman, située hors des murs de la ville habitée par les envahisseurs si inhospitaliers et si malpropres venus des pays de l’Occident. Et son père le roi Schahramân, dans les îles de Khaledân, ne douta plus, après avoir vu dans la forêt les membres sanglants, de la perte de son bien-aimé Kamaralzamân ; et il prit le deuil, lui et tout son royaume, et fit bâtir un monument funèbre où il s’enferma pour pleurer dans le silence la mort de son enfant.

Et, de son côté, Kamaralzamân, malgré la compagnie du vieux jardinier qui faisait de son mieux pour le distraire et lui faire espérer l’arrivée d’un navire qui pût le transporta à l’île d’Ébène, vivait tristement et se rappelait avec douleur les beaux jours passés.