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histoire du roi omar … (aziz, aziza)
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fromage mou qui ne tarda pas à arrêter l’écoulement de mon sang. Puis, cela fait, l’adolescente vint à moi, me donna un verre de sirop pour étancher ma soif et me dit d’un ton méprisant : « Retourne maintenant là d’où tu étais venu ! Tu ne m’es plus rien, et tu ne peux plus me servir à quoi que ce soit, puisque, la seule chose dont j’avais besoin, je l’ai prise ! Et mon désir est assouvi ! » Et elle me repoussa du pied et me chassa de sa maison, en me disant : « Estime-toi heureux de pouvoir sentir encore ta tête sur tes épaules ! »

Alors moi, douloureusement, je me traînai jusqu’à la maison de ma jeune épouse, en marchant pas à pas ; et, arrivé à la porte, que je trouvai ouverte, je m’introduisis en silence et allai tomber massivement sur les coussins de la grande salle. Aussitôt accourut mon épouse qui, me trouvant tout pâle, m’examina attentivement et me força à lui raconter l’aventure et à lui montrer mon individu mutilé. Mais je ne pus supporter la vue de moi-même et tombai, encore une fois, évanoui.

Lorsque je revins de mon évanouissement, je me vis étendu dans la rue, au bas de la grande porte ; car mon épouse, elle aussi, m’ayant trouvé tel qu’une femme, m’avait jeté hors de sa demeure.

Alors, dans un état misérable, je me ramassai et m’acheminai vers ma maison, où j’allai me jeter dans les bras de ma mère qui depuis longtemps me pleurait et ne savait sur quelle terre j’étais égaré. Elle me reçut en sanglotant, et me vit dans un état de pâleur et de faiblesse extrêmes…