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les mille nuits et une nuit

n’eût jamais un mot amer contre toi ; au contraire ! elle eut pour toi, jusqu’à la fin, des paroles de bénédiction. Donc, ô Aziz, par Allah sur toi ! raconte-moi ce que tu as fait à cette infortunée pour la faire ainsi mourir ! » Je répondis : « Moi ? rien du tout ! » Mais ma mère insista et me dit : « Quand elle fut sur le point d’expirer, j’étais à son chevet. Alors elle se tourna vers moi, ouvrit un instant les yeux et me dit : « Ô femme de mon oncle, je supplie le Seigneur de ne demander compte à personne du prix de mon sang, et de pardonner à ceux qui m’ont torturé le cœur ! Voici en effet que je quitte un monde périssable pour un autre, immortel ! » Et je lui dis : « Ô ma fille, ne parle pas de la mort ! Qu’Allah te rétablisse promptement ! » Mais elle me sourit tristement et me dit : « Ô femme de mon oncle, je te prie de transmettre à Aziz, ton fils, ma dernière recommandation, en le suppliant de ne pas l’oublier ! Lorsqu’il ira à l’endroit où il a l’habitude d’aller qu’il dise ces mots, avant de le quitter :

Que la mort est douce et préférable à la trahison ! »

Puis elle ajouta : « De la sorte il me rendra son obligée, et je veillerai sur lui après ma mort comme j’avais veillé sur lui de mon vivant ! » Ensuite elle souleva l’oreiller et sous l’oreiller elle prit un objet qu’elle me chargea de te donner ; mais elle me fit faire le serment de ne te donner cet objet que lorsque je t’aurais vu revenir à de meilleurs sentiments et pleurer sa mort et la regretter sincèrement. Or, moi, mon fils, je te garde soigneusement cet objet, et