Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 4, trad Mardrus, 1900.djvu/311

Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire de ben-bekar et de schamsennahar
305

Je l’enveloppe et de mes lèvres je hume le vin de sa bouche, tandis que ses lèvres me vident entièrement ! Ainsi je m’assure la ruche même et tout le miel ! »

Lorsqu’ils entendirent ce chant, ils furent tous les trois dans une jouissance si considérable, qu’ils s’écrièrent du fond de leurs poitrines : « Ya leil ! ya salam ! Voilà ! ah ! voilà des paroles de délice ! »

Puis le joaillier Amin, jugeant que sa présence n’était plus nécessaire et au comble du plaisir en voyant les deux amants dans les bras l’un de l’autre, se retira discrètement et, pour ne point s’exposer à les troubler, se décida à les laisser seuls dans cette maison. Il prit le chemin du logis où d’ordinaire il habitait et, l’esprit tranquille désormais, il ne tarda pas à s’étendre sur son lit, en pensant au bonheur de ses amis. Et il s’endormit jusqu’au matin.

Or, en se réveillant, il vit devant lui, la figure convulsée d’épouvante, sa vieille négresse qui se frappait les joues de ses mains, en se lamentant. Et, comme il ouvrait la bouche pour s’informer de ce qui avait bien pu lui arriver, l’effarée négresse lui montra d’un geste silencieux un voisin qui était à la porte attendant son réveil.

À la prière d’Amin, le voisin s’approcha et, après les salams, lui dit : « Ô mon voisin, je viens te consoler dans l’épouvantable malheur qui s’est abattu cette nuit sur ta maison ! » Et le joaillier s’écria : « De quel malheur parles-tu, par Allah ? » L’homme dit : « Puisque tu ne le sais pas encore, sache que cette nuit, à peine étais-tu rentré chez toi, des