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les mille nuits et une nuit

ble de ses vœux et, ne voulant pas être en reste de galanterie, dit à l’adolescente : « Par Allah ! ô ma maîtresse, si je voulais m’en aller ce n’était pas seulement par crainte d’être importun, mais parce qu’en te voyant, j’avais pensé à ces vers du poète :

« Ô toi qui regardes le soleil ! vois-tu pas qu’il habite des hauteurs que nul œil humain ne saurait mesurer ?

Penses-tu donc pouvoir l’atteindre sans ailes, ou crois-tu, ô naïf, le voir descendre jusqu’à toi ? »

Lorsque l’adolescente eut entendu ces vers récités avec un accent désespéré, elle fut charmée du sentiment délicat qui les inspirait, et elle fut plus vivement subjuguée par l’air charmant de son amoureux. Aussi elle lui jeta un long regard souriant, puis elle fit signe au jeune marchand de s’approcher, et lui demanda à mi-voix :. « Abalhassan, qui est donc ce jeune homme, et d’où est-il ? » Il répondit : « C’est le prince Ali ben-Bekar, descendant des rois de Perse. Il est aussi noble qu’il est beau. Et c’est mon meilleur ami. » — « Il est gentil ! reprit la jeune femme. Ne t’étonne donc pas, Abalhassan, si tout à l’heure, après mon départ, tu vois arriver une de mes esclaves pour vous inviter, toi et lui, à me venir voir. Car je voudrais lui prouver qu’il y a à Baghdad de plus beaux palais, de plus belles femmes et de plus expertes almées qu’à la cour des rois de Perse ! » Et Abalhassan, à qui il n’en fallait pas plus long pour comprendre, s’inclina et répondit : « Sur ma tête et sur mes yeux ! »