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les mille nuits et une nuit

dans le sac, lia le sac, et jeta le tout dans la chambre ; puis, d’un geste adorable, elle dénoua sa chevelure qui retomba lourdement autour d’elle toute, et lui cacha un instant la figure ; ensuite elle plaça la lanterne au milieu des fleurs, dans le pot ; et enfin elle reprit le tout et disparut. Et la fenêtre se referma. Et mon cœur, avec l’adolescente, s’envola. Et mon état n’était plus un état.

Alors moi, sachant déjà par expérience qu’il était inutile d’attendre davantage, je m’acheminai, désolé et meurtri, vers la maison, où je retrouvai ma pauvre cousine tout en pleurs et la tête enveloppée d’un double bandeau, un autour de son front blessé et l’autre autour de ses yeux malades de toutes les larmes versées pendant mon absence et durant tous ces jours de tristesse. Et, sans me voir, elle avait la tête penchée et appuyée sur une main, et elle se berçait de l’harmonie pénétrante de ces vers admirables que tout doucement elle se murmurait :

« Ah ! je songe à toi, Aziz ! En quelle demeure loin de moi as-tu fui ? Réponds, Aziz ! Où as-tu élu domicile, ô vagabond adoré ?…

Songe à ton tour, Aziz ! Sache bien que partout où la destinée, jalouse de mon bonheur, te poussera, tu ne pourras trouver la chaleur d’asile que t’a réservée le pauvre cœur d’Aziza !

Tu ne m’écoutes pas, Aziz ! Et tu t’éloignes ! Et voici que mes yeux te regrettent dans ces larmes qui coulent intarissables.

Oh ! désaltère-toi à la limpidité d’une eau pure ou plus belle encore, et laisse ma douleur boire, pour