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histroire des animaux… (le vautour)
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et tes manquements à la parole donnée ; comment donc pourrais-je avoir confiance dans quelqu’un d’une si insigne mauvaise foi, et qui a trouvé moyen, tout dernièrement encore, de trahir et de faire périr son cousin le loup ? Car, ô traître, je suis au courant de ce méfait dont le bruit a fait le tour de toute la gent animale ! Si donc tu n’as pas hésité à sacrifier quelqu’un qui est de ta race, si ce n’est de ton espèce, après l’avoir longtemps fréquenté et flagorné de toutes façons, il est bien probable que tu ne te feras qu’un jeu de la perdition de celui qui est d’une race hostile et si différente de la tienne ! Aussi cela me rappelle fort à propos une histoire qui s’applique, vois-tu, à merveille à notre cas présent ! » Le renard s’écria : « Quelle histoire ? » Le corbeau dit : « C’est celle du vautour ! » Mais le renard dit : « Je ne connais pas du tout cette histoire du vautour. Montre un peu ce que c’est ! » Et le corbeau dit :


« Il y avait un vautour qui était d’une tyrannie, dépassant toutes les limites connues ; nul oiseau, grand ou petit, n’avait été indemne de ses vexations ; et il avait semé la terreur chez tous les loups de l’air et tous les loups de la terre, si bien qu’à son approche les bêtes de proie les plus féroces lâchaient là tout ce qu’elles tenaient et s’évadaient épouvantées de son bec effroyable et de ses plumes hérissées. Mais bientôt le temps vint où les années accumulées sur sa tête la déplumèrent entièrement et usèrent ses griffes et firent tomber en morceaux ses mandibules menaçantes et, jointes aux intempéries, rendirent