Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 4, trad Mardrus, 1900.djvu/249

Cette page a été validée par deux contributeurs.
histoire des animaux… (la puce, la souris)
243

créatures, et qui a soudain suscité dans le mien ce sentiment à ton égard. Or pour te démontrer que des individus de race différente peuvent merveilleusement s’accorder, et pour te fournir les preuves qu’à juste titre tu me réclames, je ne trouve rien de mieux que de te raconter l’histoire qui m’est parvenue de la puce et de la souris, si toutefois tu veux bien l’écouter ! »

Et le corbeau dit : « Du moment que tu parles de preuves, je suis tout prêt à entendre cette histoire de la puce et de la souris, que je n’ai jamais entendue ! » Et le renard dit :

« Ô gentil ami, les savants versés dans les livres anciens et modernes nous racontent qu’une puce et une souris avaient élu domicile dans la maison d’un riche marchand, chacune à l’endroit qui lui convenait le mieux.

« Or, une nuit, la puce, dégoûtée de toujours sucer le sang âcre du chat de la maison, sauta sur le lit où était étendue l’épouse du marchand et se faufila entre ses robes, et de là glissa sous sa chemise pour gagner sa cuisse et de là le pli de l’aine, juste à l’endroit le plus délicat. Or, vraiment elle trouva que cet endroit était fort délicat, et doux, et blanc, et lisse à souhait : aucune rugosité, aucun poil indiscret, au contraire, ô corbeau, au contraire ! Bref la puce se consolida là-dessus et se mit à sucer le sang délicieux de l’épouse jusqu’à satiété ! Mais elle avait apporté à son repas si peu de discrétion que, sous la cuisance de la piqûre, la jeune femme se réveilla et