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les mille nuits et une nuit

« Que cela est vrai, ma bonne amie ! Aussi combien n’ai-je pas à me louer de ton voisinage, bien que tu ne sois ici que depuis quelques jours, et des bonnes intentions que tu me manifestes ! Fasse Allah que toutes les voisines soient aussi honnêtes et aussi avenantes que toi ! Mais qu’as-tu à m’annoncer ? » La belette dit : « La bonne femme qui est là, dans la maison, a reçu une mesure de sésame frais et appétissant au possible. Aussi elle et ses enfants en ont mangé tout leur plein, n’en laissant qu’une poignée ou deux. Je viens donc t’avertir de la chose, car j’aime mille fois mieux que ce soit toi qui en profites que ses goinfres d’enfants ! »

À ces paroles, la souris fut dans une telle allégresse qu’elle se mit à frétiller et à agiter la queue. Sans prendre le temps de la réflexion, sans remarquer l’air hypocrite de la belette, sans faire attention à la femme qui, silencieuse, guettait, et sans même se demander quel pouvait être le mobile qui poussait la belette à un tel acte de générosité, elle courut de toute sa vitesse et se précipita au milieu du plateau où brillait, éclatant et décortiqué, le sésame ! Et gloutonnement elle s’en emplit la bouche. Mais au même moment la femme sortit de derrière la porte et d’un coup de baguette fendit la tête à la souris !

Et c’est ainsi que la pauvre souris, par sa confiance imprudente, paya de sa vie le méfait d’autrui !


— À ces paroles, le roi Schahriar dit : « Ô Schahrazade, quelle leçon de prudence ce conte ne me donne-t-il pas