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les mille nuits et une nuit

« La mort du méchant est un bien pour l’humanité, car elle purifie la terre ! »

À ces paroles le loup se mordit la patte de désespoir et de rage contenue ; mais il adoucit encore davantage sa voix et dit au renard : « Ô renard, la race à laquelle tu appartiens est réputée chez tous les animaux de toute la terre pour ses manières exquises, sa finesse, son éloquence et la douceur de son tempérament. Cesse donc ce jeu qui ne peut être sérieux de ta part, et souviens-toi des traditions de ta famille ! » Mais le renard, à ces paroles, se mit à rire tellement qu’il s’évanouit. Mais il ne tarda pas à revenir à lui et dit au loup : « Je vois, ô brute merveilleuse, que ton éducation est entièrement à faire. Mais je n’ai guère le temps d’assumer une telle besogne, et veux seulement, avant que tu ne crèves, faire entrer dans tes oreilles quelques-unes des paroles des sages. Sache donc qu’il y a remède à tout, excepté à la mort ; qu’on peut tout corrompre, excepté le diamant ; et enfin qu’on peut échapper à tout, excepté à sa destinée !

« Quant à toi, tu m’as parlé tout à l’heure, je crois, de me récompenser au sortir de la fosse et de m’accorder ton amitié. Or, je te soupçonne fort semblable à ce serpent dont, sans doute, dans ton ignorance, tu ne connais guère l’histoire ! » Et, le loup ayant reconnu son ignorance à ce sujet, le renard dit :

« Oui, ô loup, il y avait une fois un serpent qui avait réussi à s’échapper d’entre les mains du jongleur. Et ce serpent, déshabitué du mouvement pour être resté si longtemps roulé dans le sac du