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les mille nuits et une nuit

l’aspect grossier et au corps mal bâti, ont également une âme grossière et totalement dénuée de finesse ! » Or, que cela est vrai en ce qui te concerne ! Ce que tu m’as dit sur l’amitié est bien juste et ne supporte pas de contradiction, mais comme tu te leurres en voulant appliquer à ton âme de traître des paroles si belles ! Car, ô loup stupide, si vraiment tu étais si fertile en conseils judicieux, pourquoi ne trouverais-tu pas à toi seul le moyen de sortir de là-dedans ? Et si vraiment tu es aussi puissant que tu le dis, essaie donc de sauver ton âme d’une mort certaine ! Ah ! comme tu me rappelles l’histoire du médecin ! » — « Quel médecin encore ? » s’écria le loup. Et le renard dit :

« Il y avait un paysan qui était atteint d’une grosse tumeur à la main droite ; et cela l’empêchait de travailler. Aussi, à bout de moyens, il fit appeler un homme qu’on disait versé dans les sciences médicales. Et cet homme savant vint chez le malade, et il avait un bandeau sur un œil. Et le malade lui demanda : « Qu’as-tu à ton œil, ô médecin ? » Il répondit : « Une tumeur qui m’empêche de voir. » Alors le malade lui cria : « Tu as cette tumeur, et tu ne la guéris pas ? Et tu viens maintenant pour guérir ma tumeur à moi ? Tourne le dos et fais-moi voir la largeur de tes épaules ! »

« Et toi, ô loup de malédiction, avant de songer à me donner des conseils et à m’enseigner la finesse, sois donc assez fin pour te sauver de la fosse et te