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les mille nuits et une nuit

feront fort bien cette séparation ! Ô grossier animal, aux idées lourdes et à l’esprit si peu perspicace, je compare volontiers ton sort à celui du faucon et de la perdrix ! »

À ces paroles, le loup s’exclama : « Je ne comprends guère ce que tu veux me dire par là ! » Alors le renard dit au loup :

« Sache, ô toi le loup, qu’un jour j’étais allé manger quelques grains de raisin dans une vigne. Pendant que j’étais là, à l’ombre du feuillage, je vis soudain fondre du haut des airs un grand faucon sur une petite perdrix. Mais la perdrix réussit à s’échapper des griffes du faucon et elle courut au plus vite se réfugier dans son gîte. Alors le faucon, qui l’avait poursuivie et n’avait pu la rattraper, s’arrêta devant le petit trou qui servait d’entrée au gîte et cria à la perdrix : « Petite folle qui me fuis ! Ignores-tu donc ma vigilance à ton égard et le bien que je te voulais ! Le seul motif pour lequel je t’avais attrapée, c’était que je te savais affamée depuis longtemps et que je voulais te donner du grain par moi amassé à ton intention. Viens donc, ma petite perdrix, ma gentille petite perdrix, sors de ton gîte sans crainte et viens manger ce grain ! Et que cela te soit agréable et de délicieuse digestion sur ton cœur, perdrix, mon œil, mon âme ! » Lorsque la perdrix eut entendu ce langage, confiante elle sortit de sa cachette ; mais aussitôt le faucon fondit sur elle et lui enfonça ses griffes terribles dans les chairs et d’un coup de bec