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les mille nuits et une nuit

loups et tous les renards pour s’opposer en masse aux attaques d’Ibn-Adam et lui défendre l’approche de notre territoire ? »

À ces paroles, le loup cria au renard : « Je dis que tu es bien osé de prétendre à mon alliance et à mon amitié, misérable renard, fourbe et chétif ! Tiens ! attrape ça pour ton insolence ! » Et le loup allongea au renard un coup de patte qui l’aplatit sur le sol, à demi mort.

Alors le renard se ramassa en clopinant, mais se garda bien de montrer du ressentiment ; au contraire ! il prit son air le plus souriant et le plus contrit et dit au loup : « Seigneur, pardonne à ton esclave son manque de savoir-vivre et son peu de tact ! Il reconnaît ses torts qui sont grands ! Et si même il les eût ignorés, le coup terrible et mérité dont tu viens de le gratifier et qui aurait suffi à tuer un éléphant, les lui eût appris aisément ! » Et le loup, calmé un peu par l’attitude du renard, lui dit : « Soit ! mais cela t’apprendra pour une autre fois à ne point te mêler de ce qui ne te concerne pas ! » Le renard dit : « Que cela est juste ! En effet, le sage a dit : « Ne parle pas et ne raconte jamais rien avant que l’on ne t’en prie, et ne réponds jamais avant que l’on ne t’interroge ! Et n’oublie point de donner toute ton attention aux seules choses qui peuvent t’importer. Mais surtout garde-toi bien de prodiguer tes conseils à ceux qui ne les comprendraient pas, comme aussi aux méchants qui t’en voudraient pour le bien que tu leur aurais fait. »

Or, telles étaient les paroles que le renard disait au loup ; mais en lui-même il pensait : « Mon temps à