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histoire du roi omar … (aziz, aziza)
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larmes furtives. Enfin, au bout des cinq jours, elle me força à me lever et chauffa l’eau pour moi et me fit entrer au hammam de la maison ; puis elle m’habilla et me dit : « Va vite au rendez-vous ! Et qu’Allah te fasse parvenir à tes fins, et de ses baumes te guérisse l’âme ! » Alors, moi, je me hâtai de sortir et courus à la boutique du teinturier juif.

Or, ce jour-là était un samedi ; et ce juif n’avait malheureusement pas ouvert sa boutique. Malgré tout, je m’assis devant la porte de la boutique et j’attendis là jusqu’à la prière des muezzins sur les minarets, au coucher du soleil. Et comme la nuit s’avançait sans résultat aucun, je fus pris de la frayeur des ténèbres et me décidai à m’en retourner à la maison. Et j’y arrivai comme un homme ivre, ne sachant plus ce que je faisais et disais. Et je trouvai ma pauvre cousine Aziza debout dans la chambre, le visage tourné du côté du mur, un bras appuyé contre un meuble et une main sur le cœur ; et, tristement, elle soupirait des vers plaintifs sur l’amour malheureux.

Mais à peine se fut-elle aperçue de ma présence qu’elle s’essuya les yeux du coin de sa manche et vint au-devant de moi, en essayant de sourire pour me cacher sa douleur, et me dit : « Ô mon cousin bien-aimé, qu’Allah te rende durable la félicité ! Pourquoi, au lieu de revenir ainsi seul, pendant la nuit, par les rues désertes, n’as-tu pas passé le reste de la nuit chez la jeune fille, ton amoureuse ? » Alors moi, impatienté, et croyant un instant que ma cousine voulait me railler, je la repoussai durement et d’une façon si brusque, qu’elle