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histroire des animaux et des oiseaux (le berger)
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qui pouvait bien passer aussi pour un adolescent. Et du coup la grotte en fut parfumée, et le berger sentit sa vieille chair frissonner. Mais il fronça les sourcils et se renfrogna dans son coin et dit à l’intruse : « Que viens-tu faire ici, ô femme que je ne connais pas ? Je ne t’ai point appelée et n’ai besoin nullement de toi ! » L’adolescente alors s’approcha et s’assit tout près du vieillard et lui dit : « Homme, regarde-moi ! Je ne suis point femme, mais vierge encore, et je viens m’offrir à toi pour mon plaisir simplement, et pour ce que j’ai appris de ta vertu ancienne déjà ! » Mais le vieillard s’écria : « Ô tentatrice de l’enfer, éloigne-toi ! Et laisse-moi m’anéantir dans l’adoration de Celui qui ne meurt pas ! » Mais l’adolescente fit mouvoir lentement la souplesse de sa taille et regarda le vieillard qui essayait de reculer, et soupira : « Dis ! pourquoi ne veux-tu pas de moi ! Je t’apporte une âme soumise et un corps sur le point de fondre de désir ! Vois si ma gorge n’est pas plus blanche que le lait de tes brebis ! si ma nudité n’est pas plus fraîche que l’eau du rocher ! Touche ma chevelure, ô berger ! Elle est plus soyeuse à tes doigts que le duvet de l’agneau dans le ventre de sa mère ! Mes hanches sont tièdes et glissantes et se dessinent à peine, dans ma floraison première. Et mes petits seins qui se gonflent déjà, si seulement d’un doigt rapide tu les frôlais, ils frémiraient ! Viens !… mes lèvres que je sens vibrer te fondront dans ta bouche. Viens !… Viens !… j’ai des dents dont les morsures infusent la vie aux vieillards mourants, et du miel prêt à tomber goutte à goutte de tous les pores de ma chair ! Viens ! »