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les mille nuits et une nuit

la paume de sa main droite un vase rempli d’eau fraîche, et sur la paume de sa main gauche un plateau couvert de dattes, de porcelaines de lait caillé et de plats de viande de gazelle.

« Mais moi je ne pus, tant la passion m’anéantissait, ni tendre la main ni toucher à rien de toutes ces choses. Je ne sus que regarder l’adolescente et réciter ces vers que je construisis à l’instant même :

« La neige de ta peau, ô jeune fille, ah ! Et la teinture de henné est fraîche et noire encore sur tes doigts et sur la paume de tes mains !

Et je crois voir, devant mes yeux émerveillés, se dessiner sur la blancheur de tes mains la figure de quelque brillant oiseau au noir plumage !

« Lorsque le jeune homme eut entendu ces vers et remarqué le feu de mes regards, il se mit à rire et tellement qu’il faillit s’évanouir. Puis il me dit : « En vérité, je vois que tu es un guerrier hors de pair, et un cavalier extraordinaire ! » Je répondis : « Je passe pour tel ! Mais toi, qui donc es-tu ? » Et je grossis ma voix pour lui faire peur et me faire respecter. Et le jeune homme me dit : « Je suis Ebad ben-Tamim ben-Thâlaba, de la tribu des Bani-Thâlaba. Et cette jeune fille est ma sœur. » Alors moi je m’écriai : « Hâte-toi donc de me donner ta sœur comme épouse, car je l’aime passionnément et je suis de noble filiation ! » Mais il me répondit : « Sache que ni ma sœur ni moi nous ne nous marierons jamais. Car nous avons choisi cette terre