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histoire du roi omar al néma … (kanmakan)
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chargé son compagnon Sabah de la surveillance générale de toutes leurs acquisitions, qu’ils poussaient partout devant eux dans leurs incursions continuelles. Et, quand ils s’asseyaient tous deux pour le repos, ils ne manquaient pas de se raconter mutuellement leurs peines et leurs espoirs d’amour, en parlant l’un de sa cousine Force-du-Destin et l’autre de sa cousine Nejma. Et cette vie dura de la sorte l’espace de deux ans. Et voici, entre mille, l’un des exploits du jeune Kanmakân.

Un jour, Kanmakân, sur son cheval Kâtoul, marchait à l’aventure, précédé par son fidèle Sabah. Celui-ci ouvrait la marche, une épée nue à la main, et poussait de temps en temps des cris terribles en ouvrant des yeux comme des cavernes et en hurlant, bien que la solitude fût absolue dans le désert : « Hoh ! ouvrez la route ! Droite ! Gauche ! » Et ils venaient de terminer un repas où ils avaient mangé, à eux deux, une gazelle à la broche et bu d’une eau de source fraîche et légère. Au bout d’un certain temps, ils arrivèrent à une éminence au pied de laquelle s’étendait un pâtis couvert de chamelles et de chameaux, de moutons, de vaches et de chevaux ; et, plus loin, sous une tente, des esclaves armés étaient accroupis tranquillement. À cette vue, Kanmakân dit à Sabah : « Reste là ! Je vais à moi seul m’emparer de tout le troupeau, ainsi que des esclaves. » Et, ayant dit ces paroles, il fondit au galop de son coursier du haut de la colline, comme le tonnerre soudain d’un nuage qui crève, et se précipita sur les gens et les bêtes en entonnant cet hymne guerrier :