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les mille nuits et une nuit

devait avoir lieu ! Partons tout de même, car je préfère tout, plutôt que d’accoucher dans ce palais. Il te faut donc nous trouver un homme qui veuille nous accompagner dans notre voyage, car je n’ai plus la force de tenir moi-même l’arme la plus légère. » Et Grain-de-Corail répondit : « Par Allah ! ô ma maîtresse, je ne connais qu’un seul homme capable de nous accompagner et de nous défendre, c’est le grand nègre Morose, l’un des nègres du roi Omar Al-Némân ; car je l’ai bien des fois obligé et bien des fois je lui ai donné des gratifications ; et de plus, il m’a dit qu’autrefois il avait été brigand et coupeur de grands chemins. Et comme c’est lui qui est le gardien de la porte de notre palais, j’irai le trouver et je lui donnerai de l’or et je lui dirai qu’arrivées dans notre pays nous lui ferons faire un très beau mariage avec la plus jolie Grecque de Kaïssaria ! » Alors Abriza dit : « Ô Grain-de-Corail, ne lui dis rien toi-même, mais conduis-le-moi ici et je lui parlerai moi-même. »

Alors Grain-de-Corail sortit et alla trouver le nègre et lui dit : « Ô Morose, voici que le jour de ta fortune s’est enfin présenté. Mais pour cela tu n’auras qu’à faire ce que va te dire ma maîtresse. Viens donc ! » Et elle le prit par la main et le conduisit chez la reine Abriza.

Lorsque le nègre Morose eut vu la jeune femme, il s’avança et lui baisa les mains. Mais elle sentit que son cœur le repoussait, et son aspect lui déplut grandement ; pourtant elle pensa en elle-même : « La nécessité crée des obligations ! » et, malgré toute l’horreur qu’elle ressentait, elle lui dit : « Ô