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histoire du roi omar al-némân…
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héros ? ou est-ce de la sorte que la galanterie commande les égards aux femmes ? » À ces mots, Scharkân, étonné, regarda attentivement le jeune cavalier et, l’ayant bien examiné, reconnut la reine Abriza. Car c’était bien la reine Abriza avec laquelle il lui était arrivé, dans le monastère, ce qui était arrivé !

Alors Scharkân jeta au loin son épée, et se prosterna devant la jeune fille et baisa la terre entre ses mains et lui dit : « Mais pourquoi donc, ô reine, tout cela ? » Elle lui dit : « J’ai voulu t’éprouver moi-même sur un champ de bataille, et voir ton degré d’endurance et de valeur ! Et sache que tous mes guerriers, les cent qui ont combattu les tiens, sont des jeunes filles, et vierges et miennes. Et quant à moi, n’eût été mon cheval, qui s’est cabré, tu aurais vu bien d’autres choses, ô Scharkân ! » Et Scharkân sourit et répondit : « Louange à Allah qui nous a réunis, ô reine Abriza, ô souveraine des temps ! » Et la reine aussitôt donna à ses compagnes l’ordre du départ et rendit à Scharkân les vingt prisonniers, l’un après l’autre. Et tous vinrent s’agenouiller devant elle et baisèrent la terre entre ses mains. Et Scharkân se tourna vers les belles adolescentes et leur dit : « Les rois seraient honorés de pouvoir compter sur une réserve de héros tels que vous autres ! »

Puis on leva les campements, et les deux cents cavaliers prirent ensemble la route de Baghdad et marchèrent de la sorte six jours entiers, au bout desquels ils virent, au loin, luire les glorieux minarets de la Ville de paix.