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les mille nuits et une nuit

maintenant la concubine de ton père Omar Al-Némân, et mère d’enfants. Mais à ce moment elle était encore jeune fille.

« Lorsque, la fête terminée, vint le septième jour, qui était le jour du départ, Safîa dit : « Je ne veux pas retourner à Constantinia par la voie de terre, mais par mer. » Alors on lui prépara un navire et elle y descendit, elle et ses compagnes, et y fit embarquer toutes les choses qui lui appartenaient ; et l’on déploya les voiles et l’on partit.

« Mais à peine le navire s’était-il éloigné que le vent contraire s’éleva et fit dévier le navire de sa route. Et la Providence voulut que justement il y eût, dans ces parages, un grand navire plein de guerriers chrétiens de l’île de Kâfour, au nombre de cinq cents Afrangi[1] ; et ils étaient tous armés et vêtus de fer ; et ils n’attendaient qu’une occasion comme celle-là pour faire du butin, depuis le temps qu’ils tenaient la mer. Aussi dès qu’ils virent le navire où était Safîa, ils l’abordèrent et y jetèrent leurs grappins et s’en emparèrent ; puis ils le traînèrent à la remorque et remirent à la voile. Mais une tempête s’éleva, furieuse, qui les jeta tous sur nos côtes, désemparés. Alors nos hommes se jetèrent sur eux, tuèrent les pirates et s’emparèrent à leur tour des soixante jeunes filles, au nombre desquelles se trouvait Safîa, et de toutes les richesses qui étaient accumulées dans les navires. Puis ils vinrent offrir les soixante jeunes filles en cadeau au roi de Kaïssaria, mon père, et gardèrent les richesses pour eux. Alors mon père

  1. Nom générique donné à tous les Européens, par extension et arabisation du mot Français.