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les mille nuits et une nuit

mon hôte ! » Alors Scharkân fut plein de joie et remonta sur son cheval et se mit à marcher à côté de la jeune femme, suivi de toutes les autres, jusqu’à ce qu’ils fussent tous arrivés à un pont-levis en bois de peuplier, qui s’élevait et s’abaissait au moyen de chaînes et de poulies et était jeté sur le fleuve en face de la porte principale du monastère. Alors Scharkân descendit de cheval, et la jeune femme appela l’une de ses suivantes et lui dit dans le parler grec : « Prends le cheval et conduis-le aux écuries, et donne l’ordre de ne le laisser manquer de rien. » Alors Scharkân dit à la jeune femme : « Ô souveraine de beauté, voici que tu deviens pour moi une chose sacrée, et doublement sacrée à cause de ta beauté et à cause de ton hospitalité. Veux-tu, sans plus avancer, revenir sur tes pas et m’accompagner au pays des musulmans, dans ma ville, Baghdad, où tu verras bien des choses merveilleuses et tant d’admirables guerriers ! Et alors tu sauras qui je suis. Viens, jeune chrétienne, allons à Baghdad ! » À ces paroles de Scharkân, la belle lui dit : « Par le Messie ! je te croyais sensé, ô jeune homme ! C’est donc mon enlèvement que tu souhaites ? et c’est à Baghdad que tu veux m’emmener, dans cette ville où je tomberais entre les mains de ce terrible roi Omar Al-Némân qui a, pour son lit, trois cent soixante concubines qui habitent douze palais, juste selon le nombre des jours et des mois de l’année. Et je servirais une nuit à ses désirs, pour être ensuite délaissée ; et il jouirait ainsi farouchement de ma jeunesse ! Ce sont là des mœurs par vous autres admises, ô musulmans ! Ne parle donc point de la sorte, et n’espère point