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histoire du roi omar al-némân…
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à haute voix la parole qui vivifie : « Il n’y a de puissance et de force qu’en Allah le Très-Haut ! » Et aussitôt il sentit son âme s’apaiser et ne plus craindre les bêtes sauvages de la forêt, alors qu’en face la lune miraculeuse argentait la clairière ; et si belle en devenait la clairière qu’elle semblait l’une d’entre les clairières du paradis. Et Scharkân entendit, comme près de lui, des paroles délicieuses à l’excès et une voix parfaitement belle et des rires. Et quels rires ! Les humains, à les entendre, en seraient devenus éperdus de délicate volupté, éperdus du désir de les boire sur la bouche même et de mourir.

Alors Scharkân sauta à bas de son cheval et s’enfonça entre les arbres à la recherche des voix ; et il marcha jusqu’à ce qu’il fût arrivé sur le bord d’une rivière blanche à l’eau joyeuse et courante et chantante ; et à ce chant de l’eau répondaient la voix naturelle des oiseaux et les plaintes ivres des gazelles et l’assentiment parlé de tous les animaux ; et tous ensemble formaient un chant d’harmonie plein d’épanouissement. Et l’endroit lui-même était brodé et semé de fleurs et de végétaux, comme dit le poète :

N’est belle la terre, ô ma folie, que colorée de ses fleurs, et n’est belle l’eau que mariée côte à côte avec les fleurs !

Gloire à celui qui créa la terre et les fleurs de la terre et les eaux de la terre, et te plaça, ô ma folie, près des fleurs et de l’eau sur la terre !

Et Scharkân regarda et vit sur la rive opposée