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les mille nuits et une nuit

Mais, malgré tout, Daoul’makân continuait à être triste d’être séparé de son frère, d’autant plus que le siège de Constantinia menaçait de traîner en longueur. Et il s’en ouvrit un jour à son vizir Dandân et lui dit : « Que faire, ô mon vizir, pour oublier ces chagrins qui me tourmentent et chasser l’ennui qui pèse sur mon âme ? »

Le vizir Dandân répondit : « Ô roi, je ne connais qu’un seul remède à tes maux, et c’est de te raconter une histoire des temps passés et des rois fameux dont parlent les annales. Et la chose m’est aisée, car, sous le règne de ton défunt père le roi Omar Al-Némân, ma plus grande occupation était de le distraire, toutes les nuits, en lui narrant un conte délicieux et en lui récitant des vers des poètes arabes ou de mes improvisations. Cette nuit donc, quand tout le camp sera endormi, je te raconterai, si Allah veut, une histoire qui t’émerveillera et te dilatera la poitrine et te fera trouver le temps du siège excessivement court. Je puis dès maintenant t’en dire le titre qui est : histoire des deux amants aziz et aziza ».

À ces paroles de son vizir Dandân, le roi Daoul’makân sentit son cœur battre d’impatience, et n’eut plus d’autre souci que de voir enfin arriver la nuit pour entendre le conte promis, dont le seul titre le faisait déjà se trémousser de plaisir.

Aussi à peine la nuit avait-elle commencé à tomber, que Daoul’makân fit allumer tous les flambeaux de sa tente et toutes les lanternes du corridor de toile et fit apporter de grands plateaux chargés de