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les mille nuits et une nuit

inaperçu. Et si même ils parvenaient à me voir, ils ne pourraient me faire aucun mal, car je serai entre les mains d’Allah qui sait protéger ses vrais adorateurs et exterminer les impies qui le méconnaissent ! » Alors Scharkân lui dit : « Tes paroles sont pleines de vérité, ô saint ascète ! Car je t’ai vu au milieu du combat donner de ta personne avec héroïsme, et nul de ces chiens n’osait t’approcher ni même te regarder. Maintenant il ne te reste plus qu’à nous sauver d’entre leurs mains ; et plus vite tu partirais pour nous chercher du secours, mieux cela vaudrait. Voici la nuit. Pars à la faveur de ses ténèbres, sous l’égide d’Allah le Très-Haut ! »

Alors la maudite vieille essaya d’entraîner avec elle Daoul’makân pour le livrer aux ennemis. Mais le vizir Dandân, qui, en son âme, se méfiait des manières étranges de cet ascète, dit à Daoul’makân ce qu’il fallait pour l’empêcher d’en rien faire. Et la maudite fut obligée de s’en aller seule en jetant sur le vizir Dandân un regard de travers.

D’ailleurs, pour ce qui est de la tête coupée du général en chef de l’armée chrétienne, la vieille avait menti en disant que c’était elle qui avait tué ce redoutable guerrier. Elle n’avait fait que seulement lui couper la tête, une fois mort ; car il avait été tué, dans le feu du combat, par l’un des guerriers d’élite d’entre les cent gardes musulmans. Et ce guerrier musulman avait payé son exploit de sa vie ; car à peine le chef chrétien avait-il remis son âme aux démons de l’enfer, que les soldats chrétiens, voyant tomber leur chef sous la lance du musulman, se précipitèrent en masse sur ce dernier et le lardèrent de