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les mille nuits et une nuit

Lorsqu’elle fut sortie de la ville, après avoir pris avec elle cinquante guerriers d’élite versés dans la connaissance de la langue arabe, son premier soin fut de les déguiser en marchands musulmans de Damas. Car elle avait également pris avec elle cent mulets chargés d’étoffes de toutes sortes, de soieries d’Antioche et de Damas, de satins à reflets métalliques et de brocarts précieux, et beaucoup d’autres choses royales. Et elle avait eu soin de prendre, du roi Aphridonios, une lettre, comme sauf-conduit, qui contenait ceci, en substance :

« Les marchands tels et tels sont des marchands musulmans de Damas, étrangers à notre pays et à notre religion chrétienne ; mais comme ils ont fait le commerce dans notre pays, et que le commerce constitue la prospérité d’un pays et sa richesse, et comme ce ne sont point des hommes de guerre, mais des hommes pacifiques, nous leur donnons ce sauf-conduit afin que nul ne les lèse dans leur personne ou leurs intérêts, et que nul ne leur réclame une dîme quelconque ou un droit d’entrée ou de sortie sur leurs marchandises. »

Ensuite, une fois les cinquante guerriers habillés en marchands musulmans, la perfide vieille se déguisa en ascète musulman, en s’habillant d’une grande robe de laine blanche ; puis elle se frotta le front avec un onguent de sa composition qui lui donna un éclat et un rayonnement de sainteté hors de pair ; enfin elle se fit lier les pieds de façon à ce que les cordes s’enfonçassent jusqu’au sang et lais-