Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 3, trad Mardrus, 1900.djvu/180

Cette page a été validée par deux contributeurs.
168
les mille nuits et une nuit

Les jardins de roses parfumés, et les gazelles aux yeux noirs et les cheveux des gazelles.

Bien que la cruelle ait déjà été le jardin de mes délices, et ses joues les roses du jardin, et ses seins les poires et les grenades, et sa chair le miel et la rosée.

Mais désormais, sans m’attarder ni m’attacher, je veux passer ma vie dans la sérénité, entre de tendres vierges flexibles comme les jeunes rameaux flexibles, entre des beautés intactes comme les perles imperforées,

Au son des luths suaves et des guitares, en buvant la coupe aux mains de l’échanson, dans les prairies de roses et de narcisses.

Et je humerai tous les parfums de la chair, et je sucerai la salive délicate sur les lèvres, en choisissant des lèvres épaisses et de couleur rouge foncé.

Et je reposerai mes yeux sur leurs tièdes paupières. Et nous serons assis en rond près de Veau vive chantante de mes jardins ! »

Lorsque Daoul’makân eut fini de chanter ce poème sublime, Nôzhatou, qui l’avait écouté en extase, ne put plus se retenir et, soulevant fiévreusement la portière de latente, elle pencha la tête au dehors et regarda le chanteur, à la clarté de la lune. Et elle poussa un grand cri, car elle reconnut son frère. Et elle s’élança au dehors, les bras tendus, en s’écriant : « Ô mon frère ! ô Daoul’makân ! »

À cette vue, Daoul’makân regarda la jeune femme et il reconnut également sa sœur Nôzhatou. Et ils se jetèrent dans les bras l’un de l’autre en s’embrassant, puis tombèrent tous deux évanouis.