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les mille nuits et une nuit

de ses parents le voyant revenir sans Nôzhatou ; et il pleura et se sentit oppressé extrêmement et récita ces strophes :

« Objet que j’aime ! ne pourrai-je jamais de toi me rapprocher ? objet que j’aime ! et ce silence sera-t-il toujours triomphant ?

Ah ! qu’elles sont courtes les heures de l’union et leurs délices ! Ah ! qu’ils sont longs les jours de l’absence !

Viens ! viens ! prends-moi par la main ! Voici que mon corps a fondu de toute l’ardeur de mon désir !

Viens ! et ne me dis pas d’oublier. Par Allah ! ne me dis pas de me consoler. Ma seule consolation serait de te sentir dans mes bras ! »

Alors le bon chauffeur lui dit : « Mon enfant, assez pleurer ainsi. Songe, d’ailleurs, que nous sommes assis tout près de la tente du chambellan et de son épouse. » Il répondit : « Laisse-moi pleurer et me réciter des poèmes qui me bercent et peuvent éteindre un peu la flamme de ce cœur ! » Et, sans plus écouter le chauffeur, il tourna son visage dans la direction de Baghdad, sous la clarté de la lune. Et comme en ce moment Nôzhatou, de son côté, étendue sous la tente, ne pouvait dormir, toute à la pensée des absents, et qu’elle rêvait tristement, les larmes aux yeux, elle entendit non loin de la tente la voix qui chantait passionnément ces vers :

« Il a brillé un instant, l’éclair de félicité. Mais après l’éclair, la nuit est encore plus la nuit. Ainsi pour moi se changea la douce coupe où l’ami me fit boire ses délices.