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les mille nuits et une nuit

bois sous une marmite ; et elle avait à ses côtés deux petits enfants chétifs qui gémissaient lamentablement. Et Omar dit : « La paix sur toi, ô femme ! Que fais-tu donc là, seule dans la nuit et le froid ? » Elle répondit : « Seigneur, je fais chauffer un peu d’eau pour la donner à boire à mes enfants qui meurent de faim et de froid ; mais, un jour, Allah demandera compte au khalifat Omar de la misère où nous sommes réduits ! » Et le khalifat, qui était déguisé, fut ému extrêmement et lui dit : « Mais crois-tu, ô femme, qu’Omar connaisse ta misère, s’il ne la soulage pas ? » Elle répondit : « Pourquoi donc Omar est-il le khalifat, s’il ignore ainsi la misère de son peuple et de chacun de ses sujets ? » Alors le khalifat se tut et dit à Aslam Abou-Zeid : « Vite, allons-nous en ! » Et il marcha très vite jusqu’à ce qu’il fût arrivé à l’intendance de sa maison ; et il entra dans le magasin de l’intendance, et il tira un sac de farine d’entre les sacs de farine et aussi une jarre remplie de graisse de mouton, et il dit à Abou-Zeid : « Aide-moi à les charger sur mon dos, ô Abou-Zeid ! » Mais Abou-Zeid se récria et dit : « Laisse-moi les porter moi-même sur mon dos, ô émir des Croyants ! » Il répondit avec calme : « Mais serait-ce donc toi aussi, Abou-Zeid, qui porterait le fardeau de mes péchés au jour de la Résurrection ? » Et il obligea Abou-Zeid à lui mettre sur le dos le sac de farine et le vase de graisse de mouton. Et le khalifat marcha vite, ainsi chargé, jusqu’à ce qu’il fût parvenu auprès de la pauvre femme ; et il prit de la farine et il prit de la graisse et les mit dans la marmite sur le feu, et, de ses propres mains, il prépara cette nourriture, et il se