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les mille nuits et une nuit

pour maintenant tomber dans cet état de pitoyable misère ?

Oh ! qui pourrait aller vers la demeure chérie où j’habitais, et faire parvenir mes larmes à leur destinataire ? »

À ces vers admirablement rythmés, le Bédouin, qui adorait d’instinct la poésie, fut touché de pitié pour la belle malheureuse et il s approcha d’elle et lui essuya les larmes et lui donna à manger une galette d’orge et lui dit : « Une autre fois, il ne faut plus essayer de répondre quand je suis en colère, car mon caractère ne supporte pas cela. Et, comme tu me demandes ce que je peux faire de toi, voici ! Sache que je ne veux plus de toi ni comme concubine ni même comme esclave, mais je veux te vendre à quelque riche marchand qui te traitera avec douceur et te rendra la vie heureuse, comme je l’aurais, d’ailleurs, fait moi-même. Et je vais, dans ce but, te mener à Damas. » Et Nôzhatou répondit : « Que ta volonté soit faite ! » Et aussitôt on remonta à chameau et l’on repartit dans la direction de Damas ; et Nôzhatou toujours en croupe derrière le Bédouin. Et comme la faim la pressait, elle mangea un morceau de la galette d’orge donnée par son ravisseur.

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement.