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les mille nuits et une nuit

Lorsque Nôzhatou eut entendu ces paroles, elle fut toute confuse et dit : « Ô cheikh, je suis une jeune fille étrangère, et j’ai un frère malade avec lequel je suis venue du pays du Hedjaz. Et je veux bien accepter d’aller dans ta maison pour tenir compagnie à ta fille, mais à condition d’être libre de m’en retourner, tous les soirs, auprès de mon frère. » Alors le Bédouin lui dit : « Mais certainement, ô jeune fille, tu ne tiendras compagnie à ma fille que le jour. Et même, si tu le veux, nous transporterons ton frère chez moi, pour qu’il ne soit jamais seul. » Et le Bédouin parla et fit si bien qu’il décida la jeune fille à l’accompagner. Mais le perfide n’avait songé, en tout cela, qu’à la séduire, car il n’avait pas trace d’enfants d’aucune espèce, ni gîte ni maison. En effet il ne tarda pas, lui et Nôzhatou et les quatre autres Bédouins, à arriver hors de la ville, à un endroit où tout était préparé pour le départ : les chameaux étaient déjà chargés et les outres remplies d’eau. Et le chef des Bédouins monta sur son chameau et plaça vivement Nôzhatou en croupe, derrière lui, et donna le signal du départ. Et l’on s’éloigna rapidement.

Alors la pauvre Nôzhatou comprit que le Bédouin l’avait enlevée et l’avait trompée complètement ; et elle se mit à se lamenter et à pleurer sur elle et sur son frère abandonné sans secours. Mais le Bédouin, sans s’émouvoir de ses supplications, marcha toute la nuit jusqu’à l’aube, sans s’arrêter, et finit par arriver en lieu sûr, loin de toute habitation, dans le désert. Alors, comme Nôzhatou continuait à pleurer, le Bédouin arrêta sa troupe et descendit de chameau