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les mille nuits et une nuit

route avec la caravane et sortir de Damas dans la direction de Baghdad. Et voilà pour Daoul’makân et le chauffeur du hammam.

Mais pour ce qui est de la jeune Nôzhatou, sœur jumelle de Daoul’makân, elle était sortie du khân de Jérusalem pour essayer de trouver une place de servante chez quelque notable et pouvoir, de la sorte, gagner un peu d’argent et soigner son frère et lui acheter les brochettes de viande grillée de mouton qu’il désirait. Et elle s’était couvert la tête avec la vieille pièce du manteau en poil de chameau et s’était mise à parcourir les rues au hasard, sans savoir où se diriger ; et elle avait l’esprit et le cœur fort préoccupés au sujet de son frère et à cause de l’éloignement où ils étaient tous deux de leurs parents et de leur pays ; et elle élevait sa pensée vers Allah miséricordieux, et ces vers lui vinrent sur les lèvres :

« Les ténèbres s’épaississent et enveloppent mon âme de tous côtés, et la flamme inexorable me mine et m’affaiblit ; et le désir en moi crie douloureusement et fait sur ma figure se peindre mes peines du dedans.

La souffrance de la séparation, dans mes entrailles habite avec dureté ; et la continuité d’une passion que rien ne rafraîchit m’abîme déplorablement.

L’insomnie est devenue la compagne de mon deuil et le feu du désir, mon aliment. Comment pourrai-je désormais taire le secret de mon âme ?

Moi qui ne connais rien de l’art et des moyens de cacher ce que j’ai de chagrin dans le cœur,