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les mille nuits et une nuit

suis-je donc ? » Le chauffeur lui dit : « Tu es dans la ville sainte de Jérusalem. » Alors Daoul’makân sentit amèrement l’éloignement où il se trouvait et qu’il était séparé de sa sœur Nôzhatou ; et il ne put s’empêcher de pleurer et il raconta son aventure au chauffeur, mais sans lui révéler la noblesse de sa naissance ; puis il récita ces strophes :

« On m’a mis sur les épaules une charge qu’elles ne peuvent porter, et le poids m’en est lourd et étouffant.

Je dis à l’amie, cause de ma douleur, à celle qui est toute mon âme : « Ô maîtresse ! ne saurais-tu encore un peu patienter avant l’irrémédiable séparation ? » Elle me dit : « Que dis-tu donc là ? Patienter ! La patience n’est point dans mes habitudes. »

Alors le chauffeur lui dit : « Ne pleure plus, mon enfant, et remercie au contraire Allah pour ta délivrance et ta guérison. » Et Daoul’makân lui demanda : « Quelle distance nous sépare de Damas ? » Le chauffeur dit : « Il faut, d’ici, six jours de marche. » Daoul’makân dit : « Je voudrais tant y aller ! » Mais le chauffeur répondit : « Ô mon jeune maître, comment pourrais-je te laisser aller seul à Damas, toi, un si jeune garçon ! Je crains beaucoup pour toi ! Si donc tu persistais à désirer ce voyage, je t’accompagnerais moi-même, et je déciderais aussi mon épouse à venir avec nous. Et de la sorte nous irions tous vivre à Damas, dans le pays de Scham, dont les voyageurs vantent tellement les eaux et les fruits. » Et, se tournant vers son épouse, le chauffeur