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les mille nuits et une nuit

même, cette jeune femme, quoique habitant seule, est très grandement surveillée et bien gardée. Mais sache aussi que je suis une habituée de cette maison, dont je suis l’amie ; tu peux donc être sûr que tu ne pourras arriver à tes fins que par mon entremise. Hardi donc ! et prends courage ! »

Ces paroles m’armèrent de fermeté et me donnèrent du courage ; et aussitôt je me levai et me sentis le corps tout à fait dispos et revenu complètement à la santé. Et, à cette vue, tous mes parents furent dans la joie. Et là-dessus la vieille femme me quitta, en me promettant de revenir le lendemain me rendre compte de l’entrevue qu’elle allait avoir avec l’adolescente, fille du kâdi de Baghdad.

En effet, le lendemain elle revint. Mais, à la seule vue de son visage, je compris que la nouvelle n’était pas bonne. La vieille femme me dit : « Mon enfant, ne me questionne pas sur ce qui vient de m’arriver ! J’en suis encore toute émue. Imagine-toi qu’à peine lui avais-je glissé à l’oreille l’objet de ma visite qu’elle se leva toute droite et me dit avec la plus grande colère : « Si tout de suite tu ne te tais pas, ô vieille de malheur, et ne cesse tes propositions malséantes, je vais te faire punir comme tu le mérites. » Alors moi, mon enfant, je ne dis plus rien ; mais je me promis de revenir à la charge une seconde fois. Car il ne sera pas dit que j’aie entrepris en vain un projet comme celui-là, où je suis experte comme pas une au monde ! » Puis elle me quitta et partit.

Mais moi, je retombai encore plus gravement malade, et je cessai de boire et de manger.