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pour prix des achats que j’avais faits pour elle.

« Ensuite elle s’assit à côté de moi, et se mit à me parler avec beaucoup de laisser-aller et d’aisance. Et moi, je faillis mourir de joie et de bonheur. Et elle finit par me dire : « Es-tu célibataire ou as-tu une épouse ? » Alors je dis : « Eh non ! je ne connais point de femme ! » Et je pleurai en disant cela. Alors elle me dit : « Qu’as-tu à pleurer ? » Et je répondis : « C’est une chose qui vient de me passer par l’esprit. » Puis je pris le serviteur au fond de la boutique, lui tendis quelques dinars d’or et le priai de servir d’intermédiaire entre elle et moi pour cette affaire. Alors il se mit à rire et me dit : « Mais sache donc qu’elle aussi est amoureuse de toi, et beaucoup plus que toi d’elle ! Et elle n’avait aucune envie d’acheter des étoffes, et elle n’en a acheté que pour pouvoir te parler, et te dire sa passion pour toi. Aussi tu peux lui parler et lui dire ce que tu veux ; et certainement elle n’y trouvera rien à reprendre et ne te contrariera pas. »

« Mais elle, au moment où elle allait s’éloigner et prendre congé de moi, me vit tendre les dinars au serviteur qui l’accompagnait. Alors elle rentra dans la boutique et s’assit en souriant. Et je lui dis : « Accorde à ton esclave la grâce qu’il va te demander et pardonne-lui d’avance ce qu’il a à te dire ! » Puis je l’entretins de ce que j’avais dans l’esprit. Et je vis que cela lui agréait, et elle me répondit gentiment et me dit : « Ce serviteur t’apportera ma réponse à ta demande, et ma volonté ! Et toi fais exactement tout ce qu’il te dira de faire. » Puis elle se leva et s’en alla.