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mon bras, et elle vit que je n’avais plus de main. Et elle se mit à me fouiller, et trouva dans ma poche la bourse bleue qui contenait l’or. Aussi, à la vue de mon malheur, elle entra dans un désespoir sans bornes et ressentit une douleur que nul au monde n’avait jamais ressentie.

« Lorsque, le lendemain matin, je revins de mon sommeil, je vis qu’elle m’avait déjà préparé le déjeuner ; je trouvai sur une assiette quatre poulets bouillis et du bouillon de poulet et du vin en abondance. Et elle m’offrit de tout cela. Et moi je mangeai et bus ; puis je voulus prendre congé et m’en aller. Mais elle m’arrêta et me dit : « Où vas-tu ainsi t’en aller ? » Je lui répondis : « À un endroit quelconque pour me distraire et chasser des soucis qui m’accablent et me compriment le cœur ! » Elle dit : « Oh ! ne t’en va pas ! Reste encore ! » Alors je m’assis, et elle me regarda longuement et me dit : « Mon ami, quelle folie est la tienne ! Ton amour pour moi t’a affolé, je le vois, et t’a fait dépenser pour moi tout ton argent. De plus, c’est certainement à moi, je le devine, qu’est due la perte de ta main droite. Or, je te le jure, et Allah m’est témoin, jamais plus je ne me séparerai de toi et ne te laisserai loin de moi ! Et tu verras que je dis la vérité ! Et même je veux maintenant me marier avec toi légalement ! »

« À ces paroles, elle envoya chercher les témoins, qui vinrent ; et elle leur dit : « Soyez témoins de mon mariage avec ce jeune homme. Vous allez donc écrire mon contrat avec lui, et attester que j’ai touché de lui la dot du mariage. »