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les mille nuits et une nuit

Pour la petite fille, elle ne tarda pas à rentrer à la maison ; et bientôt sa mère, à la vue de sa robe fourragée et de son caleçon transpercé d’outre en outre, jeta un grand cri et examina la chose située entre les cuisses de la fillette ; et elle vit ce qu’elle vit ! Et elle tomba à la renverse et s’évanouit d’émotion et de colère. Mais elle revint à elle-même et, comme, en somme, la chose était irréparable, elle ne tarda pas à se calmer et prit toutes les précautions pour arranger l’affaire et cacher surtout l’incident à son époux, le père de la fillette. Et elle y réussit et patienta ainsi pendant deux mois, durant, lesquels ils avaient fini par me découvrir et ne cessaient de me cajoler et de me faire de petits cadeaux pour m’obliger à rentrer à la maison de mon maître. Et, une fois rentré, ils continuèrent à ne parler jamais de cette affaire-là et à la cacher soigneusement au père, qui m’aurait certainement tué ; et ni la mère ni personne ne me désiraient tant de mal, car ils m’aimaient beaucoup.

Au bout de ces deux mois, la mère réussit à fiancer la fillette à un jeune barbier, qui était le barbier du père et qui venait souvent à la maison à ce titre. Et elle lui constitua une dot sur son propre argent et lui fit le trousseau et y consacra tous ses efforts. Puis on songea à célébrer les noces. Et c’est alors qu’on fit venir le jeune barbier avec ses instruments ; et on me saisit, et le barbier me lia les bourses et me coupa mes deux œufs et, du coup, fit de moi un eunuque. Et la cérémonie du mariage eut lieu ; et on fit de moi l’eunuque de ma jeune maîtresse, et désormais je dus marcher devant