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les mille nuits et une nuit

corps. Alors il se mit, de la main droite et de la main gauche, à les attraper par grosses poignées sur sa nuque, sur sa poitrine et partout, et à les jeter au loin avec horreur, en mouvements désordonnés et effarés. Puis il dit au pêcheur : «  Misérable Karim ! comment as-tu fait pour ainsi rassembler dans tes manches et dans ton turban toutes les bêtes malfaisantes ! » Et Karim répondit : « Seigneur, ne crains rien, crois-moi ! maintenant tu sens les piqûres de ces poux ; mais si tu as la patience de faire comme moi, dans une semaine d’ici tu ne sentiras plus rien et tu seras désormais à l’abri de leurs piqûres ; et tu n’y prêteras plus la moindre attention ! » Et le khalifat se prit à rire malgré toute son horreur, mais il dit : « Malheur ! comment vais-je pouvoir laisser cette robe sur mon corps ? » Le pêcheur dit : « Ô émir des Croyants, je voudrais bien te dire quelques paroles, mais j’éprouve une grande honte de les prononcer en présence de l’auguste khalifat ! » Il répliqua : « Dis tout de même ce que tu as à dire. » Karim répondit : « Il m’est passé par l’idée, ô commandeur des Croyants, que tu as voulu apprendre à pêcher pour avoir entre tes mains un métier qui te fît gagner ta vie ! Si cela était ainsi, ô commandeur des Croyants, ces habits et ce turban feront bien l’affaire ! » Alors le khalifat se mit à rire beaucoup des paroles du pêcheur, et le renvoya. Et Karim s’en alla en l’état de son chemin, et le khalifat se hâta de prendre la corbeille en feuilles de palmier où étaient les poissons de la pêche, couvrit soigneusement ces poissons avec de bonnes herbes fraîches et, chargé