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les mille nuits et une nuit

hauteur. Toute hauteur est nivelée, et nul homme n’est petit et nul homme n’est imposant.

Et jamais l’on n’a vu ni roi, ni empire, ni prophète jeter un défi à la loi de la mort, et vivre indéfiniment. »

Puis le vizir continua ainsi : « Et maintenant, mon fils, il ne me reste plus qu’une recommandation à te faire, c’est de mettre ta force en Allah, de ne jamais perdre de vue les fins dernières de l’homme et surtout de prendre toujours grand soin de notre fille Douce-Amie, ta femme ! » Alors Ali-Nour répondit : « Ô mon bon père, voici que tu nous quittes ! et y a-t-il sur la terre quelqu’un après toi ? Tu n’étais connu que par tes bienfaits, et le jour saint du vendredi les orateurs sacrés citaient ton nom de la chaire de nos mosquées pour te bénir et faire des vœux pour ta longue vie ! » Et Fadleddine dit encore : « Ô mon enfant, j’implore Allah de me recevoir, et de ne pas me repousser ! » Puis il prononça à haute voix les deux actes de foi de notre religion : « Je témoigne qu’il n’y a d’autre Dieu qu’Allah ! et je témoigne que Mohammad est le prophète d’Allah ! » après quoi il poussa un dernier soupir, et fut pour toujours écrit au nombre des élus bienheureux.

Et aussitôt le palais entier fut rempli de cris et de gémissements ; et la nouvelle en parvint au sultan ; et toute la ville de Bassra ne tarda pas à apprendre la mort du vizir Fadleddine ben-Khacân ; et tous les habitants et jusqu’aux petits enfants dans les écoles le pleurèrent. De son côté, Ali-Nour n’épargna rien, malgré son abattement, pour rendre les funérailles dignes de la mémoire de son père.